Job
Le livre de Job est un des plus originaux de la Bible, ce qui n'est pas peu dire. Petit résumé :
Première partie, prologue dans le ciel, Dieu se félicite de l'amour que lui porte son fidèle Job. Arrive Satan qui persifle : la belle affaire, Job aime Dieu car il est riche et heureux, mais s'il devient pauvre il le maudira. Dieu autorise Satan à rendre Job pauvre, et donc Job devient proverbialement pauvre (concrètement, une bande de pillards détruit ses biens et massacre ses serviteurs et ses enfants). Mais il ne maudit pas Dieu. Satan persiste, c'est parce qu'il est en bonne santé, mais qu'on touche à sa santé et il maudira Dieu. Dieu, donc l'autorise à toucher à sa santé, aussitôt fait, voilà Job condamné à se gratter des pieds à la tête pour un ulcère (ou une lèpre) absolument répugnant. Mais il ne maudit toujours pas Dieu.
Deuxième partie, dialogues, sur terre, trois amis de Job viennent le "plaindre" et le "consoler". On se rend vite compte qu'avec de tels amis on n'a guère besoin d'ennemis. Car ils n'ont de cesse de prouver à Job que s'il est dans cette situation, c'est forcément par sa faute puisque Dieu est juste.
Troisième partie, épilogue, Dieu rend à Job la santé, la richesse et le bonheur. On n'a pas manqué de cogiter sur les dessous de l'affaire. L'analyste jungien Pierre Solié (Psychanalyse et imaginal, Imago, 1981) considère que "Satan" représente en fait un "complexe" de Dieu, une partie de son psychisme qui échappe à sa conscience et l'influence néanmoins. Et donc l'Eternel, le Créateur, le Tout-Puissant est atteint de paranoïa perverse caractérisée.
De son côté, René Girard (La route antique des hommes pervers, Grasset, 1988) estime que le prologue et l'épilogue sont des ajouts lamentables par quelqu'un qui n'a rien compris. L'important se trouve dans les dialogues, qui montrent non pas une consolation de Job mais son procès. Un procès implacable, à la stalinienne avant la lettre, où on a absolument besoin de faire admettre à l'accusé sa culpabilité pour jouer correctement son rôle de bouc-émissaire. L'obstination de Job à se proclamer innocent fait échouer la manoeuvre, et permet à l'humanité d'entrevoir la sortie de la sanglante fatalité victimaire qui la guidait (quand il y a une crise, aussi bien une épidémie qu'autre chose, il faut trouver et dévouer un coupable, Girard fait le parallèle avec Oedipe-Roi et les Animaux malades de la Peste).
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