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Les versets sataniques (Salman Rushdie)

La plus importante particularité de ce roman est qu'il a dû son succès mondial à un agent publicitaire particulièrement efficace qui s'appelait Ruollah Khomeiny, ayatollah de son état.

L'histoire controversée qui lui donne son titre est résumée ici :
http://pagesperso-orange.fr/daruc/divers/versat.htm

Le nom même de Mahomet ou Mohammed est déformé en Mahound, déformation qui remonte au moyen-âge. D'autres personnages ont leurs vrais noms, quoique pas tous. L'auteur s'amuse, l'historique Abou Sofyan devient Abou Simbel dans le roman. La Mecque devient Jahilia (nom qu'elle avait réellement porté à d'autres époques). Ce n'est d'ailleurs qu'une partie de l'oeuvre, qui oscille de façon fantastique et fantasmatique entre cette époque et le vingtième siècle.

En cherchant, on trouve des erreurs. Le roman fait de Khalid ibn Walid un musulman dès l'époque de l'"affaire" alors qu'il l'est devenu bien plus tard. Ou des assertions gratuites. Il fait mourir Khadija, première épouse du Prophète, le jour même du dénouement de l'"affaire", ce qui, dramatiquement parlant, est génial (mais historiquement on ne connait que l'année de son décès).

Après le reniement des versets sataniques, le Prophète Mahound rentre chez lui pour découvrir qu'une sorte de punition l'y attend. Une sorte de vengeance - de qui ? La lumière ou l'ombre ? Un brave type un sale type ? - dirigée comme cela est souvent le cas, contre l'innocent. La femme du Prophète, soixante-dix ans, assise au pied de la fenêtre au treillis de pierre, est adossée au mur, très droite, morte.

Des erreurs, il y en a eu aussi dans la lecture du livre. On prétend avec insistance que Rushdie a fait des épouses du Prophète des prostituées. En fait, il montre de vraies prostituées (sympathiques, le métier est honorable à ses yeux) se donnant mutuellement comme surnoms les noms des vraies "Mères des croyants". Mais ces dernière sont montrées sous un jour respectueux et aussi sympathique, y compris et d'abord Aïcha (le traducteur français a laissé la forme anglaise Ayesha), dont l'auteur n'oublie pas que d'après un hadith célèbre elle s'est un jour, ouvertement, étonnée de la façon dont l'Ange de la Révélation répondait aux désirs personnels de son Prophète de mari.

(...) Gibreel avait récité des versets lui apportant un total soutien divin. La permission de Dieu lui-même de baiser autant de femmes qu'il le voulait. Alors : que pouvait dire la pauvre Ayesha contre les versets de Dieu ? Tu sais ce qu'elle a dit ? Ceci : "Ton Dieu arrive bien vite quand tu as besoin afin d'arranger les choses à ta convenance". Eh bien ! S'il ne s'était pas agi d'Ayesha, qui sait ce qu'il aurait fait, mais personne d'autre n'aurait osé...

Il est vrai que d'après une autre histoire reprise des hadiths, l'auteur évoque dans la même conversation, et arrange un peu à sa sauce, la fameuse affaire "du collier", l'accusation d'adultère contre cette même Ayesha (Aïcha) :

- Que va faire Mahound ? voulut savoir Baal.
- Oh, il l'a déjà fait, répondit Salman. Toujours le même. Il a vu son chouchou, l'archange, et il a informé tout le monde que Gibreel avait pardonné à Ayesha." Salman ouvrit grand les bras avec une résignation profane. "Et cette fois-ci, monsieur, la dame ne s'est pas plainte que les versets tombent au moment propice".

Une remarque : d'après les sources Gibreel (Jibril, Gabriel) n'avait pas "pardonné" à Ayesha (Aïcha) il l'avait formellement innocentée, et rien d'ailleurs n'indique qu'elle ait fait autre chose que ce qu'on appellerait aujourd'hui du "stop". Se trouvant seule dans le désert et peu habituée à la marche, elle se fit prendre en charge par un bel homme voyageant à dos de chameau, qui l'y fit monter et marcha lui-même à pieds pour le coup. De cette histoire est sortie la jurisprudence de la sourate 24, La lumière : une accusation d'adultère insuffisamment étayée vaudra à ses auteurs 80 coups de fouet chacun.

L'auteur cherche avant tout à montrer à quel point Mahound pouvait être un tricheur (quant à savoir jusqu'à quel point cela s'applique à son modèle...).

Et Gibreel l'Archange précisa les conditions dans lesquelles on devait enterrer un homme, et comment on devait diviser ses biens, à tel point que Salman le Persan commença à se demander de quel genre de Dieu il s'agissait, pour ressembler tellement à un homme d'affaires. C'est alors qu'il eut l'idée qui détruisit sa foi, car il se souvint que, bien sûr, Mahound lui-même avait été homme d'affaires, et sacrément bon en plus...

Autobiographique ?



12/07/2009
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